La question centrale pour notre compréhension de l’histoire de la rédemption
Encore un livre sur la place de l’homme et de la femme dans l’Église… N’avons-nous pas fait le tour de la question ? Pourquoi insister sur un tel sujet à la fois explosif et éculé sur lequel personne ne semble pouvoir s’accorder ? De nombreux chrétiens, lassés par la persistance du débat entre « complémentariens » et « égalitariens », ont renoncé à se forger une opinion et, pour certains, se bouchent les oreilles dès qu’ils en entendent la moindre évocation.
J’estime cependant qu’il existe plusieurs bonnes raisons de publier ce petit ouvrage de Kevin DeYoung et, plus généralement, de ne pas refermer trop rapidement cette discussion.
Tout d’abord, le sujet est plus vaste qu’il n’y paraît – les questions relatives à la conduite de l’Église ne sont en réalité que la pointe émergée de l’iceberg. C’est bien l’anthropologie biblique dans son ensemble qui est mise en question, non seulement dans le domaine cultuel, mais également dans la famille et dans les interactions du chrétien avec le monde qui l’entoure. On notera d’ailleurs que ce débat n’est pas confiné à l’Église : il est au contraire largement alimenté par une forte pression sociétale qui vise à rejeter toute perception d’inégalité, en particulier les inégalités « sexuelles ».
Ce débat ne se limite pas non plus à quelques spéculations interprétatives sur une poignée de textes obscurs. L’enjeu est herméneutique : la manière dont nous abordons les passages les plus âprement débattus reflète notre angle d’approche de l’Écriture dans son ensemble. C’est donc avec raison que Kevin DeYoung consacre son premier chapitre aux textes des origines (Ge 1 – 3), dont l’interprétation oriente de manière cruciale le reste de la discussion.
La question de la fonction de l’homme et de la femme est également centrale pour notre compréhension de l’histoire de la rédemption. Pour les égalitariens, la distinction traditionnelle des rôles est perçue comme un carcan désuet dont il faut se libérer, tandis que les complémentariens cherchent à l’actualiser de manière harmonieuse en conformité avec l’ordre créationnel qui existait avant la chute.
Enfin, et c’est sans doute l’aspect le plus pratique de ce débat, ce sont deux compréhensions radicalement différentes du fonctionnement de l’Église locale qui s’opposent. Il est rare qu’elles coexistent paisiblement au sein d’une même assemblée. Par exemple, comment répondre aux aspirations des femmes qui s’estiment appelées à l’enseignement ou aux rôles de direction dans l’Église ? Comment désamorcer les tensions et les frustrations qui résultent de positions si divergentes ?
Kevin DeYoung, dont la clarté et la précision sont bien connues du public francophone, offre dans cet ouvrage une analyse à la fois concise et exhaustive, en prenant en compte les aspects les plus récents de la discussion. La section pratique, pleine de bon sens, contient de nombreux conseils utiles pour naviguer avec sagesse entre les différents écueils de ce débat.
C’est donc un ouvrage utile et important que vous tenez entre vos mains – peut-être le meilleur qu’il m’ait été donné de lire sur ce sujet. Puisse-t-il stimuler votre réflexion et vous équiper efficacement pour l’œuvre de l’Évangile.
Guillaume Bourin, pasteur, auteur de Je répandrai sur vous une eau pure et fondateur du blog Le Bon Combat